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#11 - Retour à la ferme

Il y a de ça une semaine, nous écrivions depuis la baie de San Francisco, chez Carter qui avait gentiment accepté de nous héberger pour une nuit. Mais cela nous semble déjà loin ! Les aventures se sont succédées et cette semaine a été l’une des plus riches en surprises depuis le début du voyage. C’est aujourd’hui depuis un petit coin de paradis dans une ferme du fin fond de l’Oregon que nous écrivons.

Nous avons commencé la semaine comme nous l’avions finie : le pouce en l’air, le long de la Highway 1, cette autoroute qui longe toute la côte Ouest des Etats-Unis. Nous avons vite observé, avec soulagement, que faire du stop devenait plus facile une fois éloignés de la ville.

Très vite, lundi, nous avons été pris en stop, par un jeune couple de surfers californiens d’abord, puis par Alain et Manon, deux Québécois dont la générosité nous a encore une fois étonnés. Après nous avoir longuement promenés le long des plages désertes du Nord de la Californie et au milieu de prairies immenses surplombant l’océan, ils ont continué à avancer dans notre sens plus que prévu pour nous rendre service. Pendant plus d’une heure, nous avons donc roulé vers le Nord, même si ça n’était pas leur direction initiale, et avant de nous laisser planter la tente dans la nature, Manon et Alain nous ont même offert une bonne bouteille de vin rouge ! Gênés de n’avoir rien de concret à leur donner en échange, nous avons accepté avec émotion ce cadeau désintéressé … que nous avons ouvert quelques jours plus tard en arrivant dans notre nouvelle ferme.

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Dans le Van d'Alain et Manon

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Pas trop de monde sur la plage !

Mais c’est le mardi, après une rude nuit dans notre tente au milieu de nul part, que la journée a été la plus surprenante. Beaucoup des rencontres que nous avons faites au cours de ce voyage nous ont surprises par l’aptitude de certaines personnes à se laisser porter par la vie sans chercher à planifier, organiser, contrôler les événements. Même si nous n’avons pas envie de vivre dans un chaos désordonné, nous trouvons un certain charme à cette capacité de lâcher prise, donnant une trajectoire imprévisible aux journées qui parfois se ressemblent tant.

Mardi, donc, nous avons été pris en stop à une centaine de kilomètres au Nord de San Francisco, par John Adam au volant de sa vieille mais belle Mercedes. Après quelques présentations, celui-ci nous apprend qu’il part le lendemain à Hawaï et cherche à vendre sa voiture avant de s’en aller.

Après un essai de dix minutes, nous n’avons pas hésité longtemps. Quelques heures de démarches administratives et de vérifications mécaniques et nous voilà au volant de la voiture dans laquelle nous avons été pris en stop quelques heures auparavant. C’est la première voiture que nous achetons, et nous n’aurions pas cru celui qui nous aurait prédit 24 heures auparavant que nous roulerions en Mercedes sur la route One !

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Jules, John Adam, Tristan et le bolide

Même si cela ne nous inquiétait pas outre mesure, il nous aurait fallu au moins une semaine de plus pour traverser en stop les 1000 kilomètres nous séparant du Nord de l’Oregon, et notre arrivée prévue le 8 avril en était largement compromise. Avec cette voiture, le problème s’est résolu assez facilement ! Pendant deux jours, nous avons roulé au milieu des immenses forêts de séquoias d’abord, puis le long de la côte Pacifique de l’Oregon.

Notre fière voiture nous surprend néanmoins de temps en temps. En remontant vers le nord le climat a rapidement changé et il nous a fallu peu de temps pour réaliser qu’il pleuvait dans la voiture à chaque fois que nous traversions une averse. Imaginez l’un de nous d’eux en train de conduire pendant que l’autre -une tasse vide dans chaque main – repère les fuites et récupère l’eau qui tombe dans l’habitacle. Nous avons également dû faire sans nos valises, le coffre ayant refusé de s’ouvrir pendant deux jours ! Mais nous sommes indulgents : la voiture a 36 ans… Nous l’avons d’ailleurs baptisée High Hopes pour les espoirs que nous plaçons en elle : nous osons croire qu’elle nous conduira jusqu’en Alaska !

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Riders on the storm

Au cours de cette longue route, nous avons pu nous arrêter pour observer les richesses de la nature sur la côte pacifique américaine. Nous avons notamment aperçu au loin une baleine longeant la côte. Un ranger nous a expliqué leur migration : chaque année, de mars à l’été, les baleines remontent de la mer de Cortez au Mexique – où elles ont mis bas un baleineau - jusqu’en Alaska. Un peu comme nous !

Nous avons également compris pourquoi il était parfois difficile d’être pris en stop aux Etats-Unis. Le seul auto-stoppeur que nous avons croisé (et donc pris dans notre voiture) s’est en effet avéré être un spécimen assez étrange. Il nous a tenu un discours incompréhensible sur la crainte du jugement dernier. Il faut croire que ce ne sont pas les mêmes populations qui font de l’auto stop en France et aux Etats-Unis !

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Pause observation des baleines !

Après deux jours et deux nuits à conduire et dormir dans « High Hopes », nous sommes finalement arrivés à Harmony Haven, ferme située à 1 heure au Sud de Portland et dans laquelle vivent Daryll et Kim depuis près de 10 ans. C’est encore dans le cadre du WWOOFing que nos deux hôtes nous ont reçus, nous offrant un lit confortable et trois repas par jour contre notre aide au travail dans la ferme. Quel plaisir pour nous de retrouver un tel confort après près de 3 semaines sur la route !

La vie rurale nous avait manqué, et c’est avec joie que nous avons revêtu jeudi et vendredi nos habits de travail. Daryll et Kim possèdent une trentaine de brebis, dont seize sont enceintes quand nous arrivons, une dizaine de canards, trois dindes et une quarantaine de poulets, poules et coqs. De ces animaux viennent non seulement la viande qu’ils consomment tous les jours, mais aussi la laine que Kim travaille longuement pour en faire bonnets, écharpes ou couvertures. Ils exploitent également un petit jardin potager qui leur permet d’être quotidiennement alimentés en légumes.

Alors qu’ils travaillaient tous les deux dans de grandes entreprises technologiques dans la baie de San Francisco, ils se sont rendus compte que tel n’était pas l’environnement qui les rendait heureux, et ont mis en place un plan de dix ans pour en sortir en se retirer en Oregon. Kim travaille toujours comme database consultant mais depuis chez elle, tandis que Daryll s’occupe de la ferme à temps plein.

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Daryll et son troupeau

C’est dans une atmosphère différente de celle que nous avons connue en Uruguay que nous travaillons ici. Daryll évolue dans sa ferme avec un calme religieux, enchaînant les tâches sereinement, sans précipitation. Nous ne nous sentons donc pas sous pression ici, et nous prenons le temps d’apprécier le plaisir de travailler à l’air libre, sous le soleil, l’esprit détendu.

Notre journée commence aux alentours de 6 heures, ce qui nous permet de faire l’essentiel de nos tâches le matin, et de jouir de nos après-midi libres pour nous reposer, et lire paisiblement sur leur terrasse ensoleillée.

Grâce au Mexique et à l’Uruguay, nous avons le sentiment d’en connaître déjà beaucoup sur les cultures de légumes et de céréales, et nous sommes heureux de commencer cette nouvelle expérience avec du bétail.

Et ce que nous avons appris dès les premiers jours, c’est que qui dit bétail dit clôtures, et qu’une des tâches principales d’un éleveur est de les inspecter et les réparer pour assurer la sécurité de ses troupeaux

En deux jours, nous avons donc travaillé à planter d’énormes poteaux de bois afin de solidifier une des clôtures des moutons, et nous avons longuement nettoyé l’étable qui abrite l’un des deux troupeaux de moutons.

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Tristan en plein travail

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Jules en plein travail

Mais cette fin de semaine a surtout été marquée par une nouvelle surprise. Nous avons en effet eu la grande chance de voir notre arrivée coïncider avec la période d’accouchement des brebis enceintes. Vendredi – jour de l’anniversaire de Tristan – et pour la première fois de notre vie, nous avons assisté à la naissance de deux agneaux. C’est avec émotion que nous avons regardé pendant de longues minutes les efforts d’une brebis pour donner la vie à ses jumeaux, puis l’instinct maternel avec lequel elle protégeait ses nouveau-nés. Déjà huit agneaux sont nés en trois jours, et nous n’avons jamais rien vu d’aussi attendrissant. Elevés jusqu’à 18 mois, ils seront néanmoins ensuite envoyés à l’abattoir.

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Nés le même jour, à 23 ans et quelques milliers de kilomètres d'écart

Ses premiers pas !

Puisque Darryl et Kim élèvent des animaux en vue d’en vendre la viande, nous avons – trois fois par jour – le plaisir de manger des pièces d’agneaux succulents ou des cuisses de poulet plus tendre que jamais ! En effet, toute la viande qu’ils consomment provient de leur exploitation, et ils savent donc exactement ce qui arrive dans leurs assiettes tous les jours.

Hier, nous sommes allés tous ensemble au Farmers Fest local où nous avons entre autre assisté à un concours de labourage à la charrue. Ambiance USA garantie et nous avons le sentiment du dépaysement profond que nous recherchons cette année.

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Une certaine Amérique

Nous te souhaitons une bonne semaine !

A dimanche prochain.

Travelling Farmers

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